En préambule, il convient de rappeler que le travail peut être source d’équilibre mais peut également être à l’origine de problèmes allant du mal-être à l’apparition de pathologies plus graves. Les risques psycho-sociaux ont été identifiés comme des risques pour la santé mentale1 . Néanmoins, les actions de prévention primaire relatives aux risques psychosociaux ne sont pas traitées dans cette fiche car ils font l’objet d’une fiche action ad hoc dans le PRST 4 (fiche action n°7).
VOLET 1 : PREMIERS SECOURS EN SANTE MENTALE
La santé mentale est une composante essentielle de la santé. La Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) définit la santé comme : « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». La santé mentale regroupe différentes dimensions relatives au bien-être perçu, à la présence de symptômes associés à une détresse psychologique ou encore à la présence d’une maladie mentale, elle-même pouvant relever de réalités très différentes. L’OMS estime que les maladies mentales se classent au troisième rang des maladies en termes de prévalence après les cancers et les maladies cardio-vasculaires. En France, environ 3 millions de personnes souffrent de troubles psychiques sévères. Les conséquences de tels troubles sont majeures pour l’individu concerné, qui présente un risque suicidaire accru, et plus largement un risque plus élevé de mortalité prématurée. Les troubles psychiques constituent également un enjeu prédominant pour la société aussi bien en matière de prise en charge médicale que d’insertion sociale et professionnelle.
Les crises sanitaires, politiques, économiques… peuvent avoir un rôle de catalyseur des problèmes de santé mentale, mettant en exergue la nécessité de porter une attention spécifique à cette dimension. Dans le cas de la crise sanitaire liée à la Covid-19, l’isolement, la baisse d’activité physique, l’augmentation du stress, l’ennui, l’organisation du travail à domicile couplée à la gestion de la vie familiale… sont autant de facteurs qui peuvent avoir un impact sur la santé mentale. Sur la semaine du 23 au 25 mars 2020, l’enquête Coviprev indique que 27 % des personnes interrogées présentaient un état d’anxiété élevé (score > 10 sur l’échelle HAD2). Ces augmentations ont été particulièrement observées chez les femmes, les plus jeunes ainsi que chez des populations ayant un statut socioéconomique modeste.
VOLET 2 : PREVENTION DU SUICIDE
La France se positionne au 10e rang (sur 28) des pays de l’union Européenne présentant les taux de suicide les plus élevés, derrière les pays de l’Est, la Finlande et la Belgique. Avec environ 2 décès et 20 tentatives de suicide par jour, la Bretagne est la région de France la plus fortement touchée par le suicide. Si la région Bretagne suit la tendance nationale de diminution de la mortalité par suicide depuis les années 2000, elle conserve une surmortalité masculine de 60 % et une surmortalité féminine de 51 % vis-à-vis de la moyenne française. Cette surmortalité présente cependant une hétérogénéité infra régionale, les taux standardisés de mortalité variant dans une fourchette de 18 décès par suicide pour 100 000 habitants dans le pays de Rennes à 37 pour 100 000 dans le pays de Loudéac Communauté.
La corrélation entre conduites addictives et suicidaires a été démontrée. Elle trouve notamment ses origines dans des facteurs communs de vulnérabilité (facteurs sociaux, familiaux, environnementaux ou psychopathologiques) qui doit conduire à intégrer les enjeux autour des conduites addictives lorsque l’on parle du suicide. Les données disponibles incitent ainsi à allers vers un décloisonnement des approches de prévention, de repérage précoce, d’évaluation et de soins en santé mentale, suicidologie et addictologie.
Le suicide est en grande partie évitable, ce qui en fait un enjeu majeur de santé publique.
L’instruction du 06 juillet 2022 actualisant celle du 10 septembre 2019 relative à la stratégie nationale de prévention du suicide identifie un ensemble d’actions de prévention intégrées, simultanées et territorialisées qui ont comme objectifs communs de faire en sorte de repérer et de maintenir le lien avec les personnes en souffrance et de les orienter vers les ressources appropriées. Il s’agit :
L’ambition est de parvenir, par le déploiement articulé de ces actions complémentaires, à infléchir de façon plus rapide la courbe des décès par suicide.
Données sur le suicide et les tentatives de suicide en Bretagne
En moyenne sur 2015-2017, 680 bretons se sont suicidés chaque année. La Bretagne est la région la plus touchée par le suicide, chez les hommes (+53 % par rapport à la moyenne nationale) comme chez les femmes (+51 %). Chez les jeunes bretons âgés de 15 à 34 ans, 1 décès sur 4 est un suicide. Depuis le début des années 2000, la mortalité par suicide diminue en Bretagne, chez les hommes (-21 % entre 2010-2012 et 2015-2017) et chez les femmes (- 33 %). Cette diminution est également observée au niveau national, et de manière moins marquée (-17 % chez les hommes et -25 % chez les femmes). En 2020 en Bretagne, 5 580 séjours hospitaliers en court séjour sont en lien avec une tentative de suicide. Ces séjours concernant majoritairement des femmes (59 %) et des personnes de 15-24 ans et 45-54 ans. Le recours hospitalier est en baisse, avec en 2020, année de survenue de la pandémie de COVID19, le taux le plus faible observé depuis 2008.
Référence : ORS Bretagne, Observation du phénomène suicidaire en Bretagne – Tableau de bord 2022.
Données spécifiques suicide et travail
Le suicide est un phénomène complexe et multifactoriel qu’il est difficile de rattacher à une unique cause. Un lien peut être établi entre des contraintes de travail génératrices de stress chronique et l’apparition d’une dépression qui peut, ensuite, favoriser un passage à l’acte suicidaire. Mais il existe également des actes suicidaires qui ne sont pas la conséquence d’un état dépressif antérieur, qui marquent un passage à l’acte brutal (raptus), lié à un élément déclencheur conjoncturel et auquel personne ne s’attendait.
Certains suicides sur le lieu du travail peuvent être complètement indépendants de la situation professionnelle, le lieu du travail fournissant alors une occasion pour passer à l’acte. À l’inverse, des suicides en dehors du lieu de travail peuvent être liés à des facteurs d’ordre professionnel.
Quelles qu’en soient les raisons, un suicide ou une tentative de suicide qui survient sur le lieu de travail aura souvent un impact fort sur l’entreprise et les salariés.
Selon le baromètre de Santé publique France 2017, chez les actifs, 4,5 % des femmes et 3,1 % des hommes ont eu des pensées suicidaires et un tiers d’entre eux les attribuait à des raisons professionnelles. Si les taux de suicide les plus élevés concernent les chômeurs, quelques études ont montré que les personnes travaillant dans certains secteurs d’activité, tels que l’agriculture, la santé et l’action sociale sont plus exposées à un risque de décès par suicide. De plus, un gradient social est observé parmi les salariés dans plusieurs études, avec un risque plus faible de suicide chez les cadres et plus élevé chez les ouvriers.
1 L’exposition à ces situations de travail peut avoir des conséquences sur la santé des salariés, notamment en termes de maladies cardio-vasculaires, de troubles musculosquelettiques, de troubles anxio-dépressifs, d’épuisement professionnel, voire de suicide.
2 Échelle HAD : Hospital Anxiety and Depression scale, instrument qui permet de dépister les troubles anxieux et dépressifs.
Références :
Volet 1 : Association Santé Mentale France.
Volet 2 : MSA, MFB (Collectifs MISACO).
VOLET 1 : PREMIERS SECOURS EN SANTE MENTALE
Le travail peut protéger la santé mentale et peut contribuer au rétablissement, à l’inclusion des personnes souffrant de problèmes de santé mentale, leur donner davantage confiance en elles et améliorer leur fonctionnement social. Les pouvoirs publics, les employeurs, les organisations qui représentent les salariés et les employeurs, ainsi que d’autres acteurs responsables de la santé et de la sécurité des salariés doivent contribuer à améliorer la santé mentale au travail en prenant notamment des mesures pour :
Dans ce contexte et afin de garantir sur l’ensemble du territoire une prise en charge précoce, un repérage efficace et une dynamique d’« aller vers », et favoriser le développement d’une culture de la santé mentale, le Président de la République a annoncé, lors des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie des 27 et 28 septembre 2021, sa volonté de généraliser le secourisme en santé mentale dans tous les secteurs de la société.
La mise en place d’une offre de formation au secourisme en santé mentale contribue au développement d’une culture de la prévention des situations de détresse psychique et à lutter contre la stigmatisation des troubles psychiques.
Le secourisme en santé mentale est à entendre dans le sens d’une capacité à réagir à la détresse psychique d’une personne et à entrer en relation avec elle. Il ne s’agit ni de prodiguer des soins, ni de remplacer les professionnels de la santé mentale (médecins ou psychiatres, infirmiers, psychologues…). Il s’agit bien d’une possibilité proposée en plus. Le secourisme en santé mentale s’appuie sur l’intervention de pairs, qui ont reçu une formation au contenu validé et à l’efficacité démontrée, leur permettant d’appréhender la santé mentale et les troubles psychiques, d’identifier des signes de souffrance et d’assurer un premier niveau de conseil, d’aide de proximité et de médiation vers les aides spécialisées et les soins. À l’instar des « gestes qui sauvent » dont l’objectif est d’apporter une aide physique immédiate à la personne en difficulté, le secourisme en santé mentale vise à prévenir des situations de crises et orienter les personnes en situation de détresse psychique vers les professionnels de la santé mentale. Les secouristes ne sont pas habilités à réaliser des entretiens à visée psychothérapeutique. Ils sont formés pour pouvoir établir le dialogue avec une personne en souffrance, communiquer avec bienveillance, sans intrusion et d’égal à égal.
Être secouriste en santé mentale, c’est apprendre à réagir face à une détresse psychique et entrer en relation avec les personnes. Être secouriste en santé mentale, c’est reconnaître que la santé mentale est l’affaire de tous. Conçue sur le modèle des « gestes qui sauvent », la formation aux premiers secours en santé mentale (PSSM) permet une meilleure connaissance de la santé mentale, des troubles 5 psychiques, un repérage de ces troubles et donne des éléments pour savoir réagir devant une personne en souffrance ou en crise.
L’objectif fixé par les pouvoirs publics est d’atteindre 60 000 secouristes en santé mentale en 2023 et 150 000 en 2025.
VOLET 2 : PREVENTION DU SUICIDE
Une des cinq actions de la stratégie de prévention du suicide concerne la formation et vise trois fonctions spécifiques s’adressant à des publics différents : le repérage (Sentinelle)3 , l’évaluation/l’orientation4 et l’intervention sur la crise suicidaire5. L’objectif de la formation est de structurer le repérage des personnes à risque suicidaire et leur accompagnement vers le soin, grâce à un réseau de personnes–relais, en lien avec les professionnels qui réalisent la prise en charge.
Comme le secourisme en santé mentale, le module sentinelle de la formation en prévention du suicide s’adresse à des citoyens ou professionnels non-soignants qui peuvent, au sein de leur communauté de vie, repérer des signes d’alerte chez une personne et l’orienter ensuite vers les ressources professionnelles appropriées. Cependant, ces deux formations diffèrent : la sentinelle est spécifiquement formée à la prévention du suicide alors que le secouriste reçoit une formation plus large qui concerne les principaux troubles de santé mentale (dépression, anxiété, psychose et addictions) ainsi que les crises qui peuvent se produire. Une autre différence importante est liée au fait que la formation sentinelle s’intègre dans le cadre de la mise en place d’un dispositif, d’un réseau à part entière, le dispositif sentinelle. Les formations de secourisme en santé mentale et sentinelles se complètent donc sur un territoire, au sein d’une structure …
Pour le monde agricole, la mission d’animation du réseau sentinelle est portée par la MSA et notamment intégré dans la feuille de route « Prévention du mal-être et accompagnement des agriculteurs en difficulté ».
3 La formation Sentinelle : fonction de repérage et d’orientation, qui s’adresse à des citoyens ou des professionnels non cliniciens.
4 La formation Evaluation/Orientation : fonction d’évaluation clinique du potentiel suicidaire et d’orientation.
5 La formation d’intervention sur la crise suicidaire : fonction d’évaluation clinique du potentiel suicidaire et d’intervention qui s’adresse à des professionnels de santé ou psychologues, qui réalisent de manière régulière de l’intervention de crise.
VOLET 1 : PREMIERS SECOURS EN SANTE MENTALE
Le déploiement des PSSM en milieu professionnel est donc à encourager et à soutenir. Il peut notamment trouver une traduction par :
Les acteurs du PRST4 vont s’attacher à rendre visible l’offre de formation aux PSSM aux acteurs en prévention en santé au travail via notamment : – des actions de communication (mails, newsletters, webinaires …) à l’attention des employeurs et des services de santé au travail et du milieu scolaire avec la DREETS, la CARSAT, PRESANCE, … notamment en lien avec la semaine de la santé mentale ; – le site internet du PRST.
VOLET 2 : PREVENTION DU SUICIDE
Au titre de la formation, il apparait pertinent de pouvoir proposer :
Concernant plus spécifiquement les sentinelles (personnes volontaires qui ne sont pas des professionnels du soin et qui s’engagent dans une démarche de veille et d’appui potentiel aux personnes en souffrance psychique), au-delà de la formation, il y a un enjeu :
Les acteurs du PST4 vont s’attacher :
Volet 1 : 2023.
Volet 2 : 2024.